Les personnes en situation précaire sont encore plus vulnérables en période de pandémie. Anne Reitsema, directrice des opérations de Medair, nous explique comment une organisation humanitaire gère le Covid19.
Medair intervient dans des régions reculées et dévastées du monde. Comment la crise sanitaire due au Covid19 impacte-t-elle ces pays ?
Certains de ces pays ne disposent ni du personnel, ni des équipements médicaux nécessaires pour faire face au Covid19. En plus d’un impact direct sur la santé publique, cette pandémie a un effet socio-économique indirect très important. Les fortes mesures prises pour contenir le Covid19, comme les restrictions d’interaction sociale et de déplacement, entraînent des pertes d’emplois et affectent les revenus des ménages vulnérables.
De plus, les foyers multi générationnels sont plus grands et occupent des abris de fortune. Dans de telles conditions, il s’avère impossible de respecter les normes de distance sociale et d’hygiène requises pour limiter la propagation du virus. En effet, comment y parvenir lorsqu’il manque du savon ou des points d’eau ?
Comment avez-vous réagi face à cette situation du Covid19 ?
Medair est une ONG Suisse d’aide d’urgence et reconstruction. Notre expérience est reconnue dans la gestion de crises. Aujourd’hui, Medair a activé une cellule, qui suit la situation de près et planifie les actions de réponse. Le but majeur est de continuer à sauver des vies grâce à l’apport de services essentiels – la nutrition, la santé et la provision d’eau, tout en réduisant au minimum les risques pour notre personnel et pour les gens que nous aidons.
Nous nous adaptons donc à la situation actuelle. À titre d’exemple, dans des zones isolées de l’Afghanistan ou au Bangladesh, dans le plus grand camp de réfugiés du monde, nous fournissons désormais des rations de nourriture plus importantes aux plus vulnérables afin de limiter leurs déplacements à notre clinique et ainsi les risques de contagion.
Medair déploie aussi une réponse spécifique au Covid19. Premièrement, notre action se focalise sur la diffusion de messages de prévention et sensibilisation. Deuxièmement, nous assurons une assistance vitale aux personnes très vulnérables, comme les réfugiés, les déplacés et les communautés d’accueil. De plus, en collaboration avec les Ministères de la Santé et d’autres organisations humanitaires, nos équipes de santé isolent les cas suspects et confirmés.
De quoi avez-vous besoin pour y faire face ?
Une crise sanitaire de cette ampleur nécessite des ressources humaines, matérielles et financières conséquentes et imprévues. Bien avant son déclenchement, l’UN prévoyait qu’un nombre record de 168 millions de personnes à travers le monde aurait besoin d’aide humanitaire en 2020. Cette pandémie aggrave la situation.
Les défis auxquels nous sommes confrontés actuellement nous poussent à faire preuve de créativité et nous encouragent à unir nos forces avec celles de nos partenaires dans le secteur privé.
De plus, l’utilisation de nouvelles technologies s’avère utile et efficace pour répondre à ces défis. Au Liban, par exemple, nous collaborons avec le secteur privé des technologies de l’information pour cartographier les différentes actions mises en place par les différents acteurs pour faire face au Covid19.
La communication avec les gens que nous aidons est cruciale, car de nombreux foyers isolés manquent d’informations claires sur le virus. Nos équipes explorent tous les moyens – y compris WhatsApp et les diffusions sur des radios communautaires au Soudan du Sud ou en RDC– pour diffuser ces messages de prévention.
Au Liban, nos psychologues organisent des appels vidéo pour soutenir la santé mentale des réfugiés syriens et des populations libanaises les plus vulnérables.
Qu’en est-il de la solidarité à l’échelle internationale ?
Les gens en Suisse, en Europe et dans le monde réalisent la gravité de la situation et sont généreux. Mais cette solidarité mondiale n’est pas limitée à un plan financier. Nous sommes surpris par le courage et la générosité de notre staff national et international qui a choisi de rester au poste et continue à servir les plus vulnérables. Dans cette tragédie, il faut aussi voir ces gestes de générosité et de compassion qui font la différence et sauvent des vies.
Que peut faire chacun à un niveau individuel pour vous soutenir ?
Malgré cette incroyable solidarité, il reste encore à faire.
Quand l’épidémie atteindra des pays aux systèmes de santé plus fragiles, les conséquences pourraient être catastrophiques. Aujourd’hui plus que jamais, il est impératif de ne pas oublier les gens qui disposent de ressources limitées. Nous devons travailler tous ensemble pour lutter contre cette pandémie, y compris parmi les personnes pauvres et vulnérables pour la vaincre.
Si vous souhaitez en savoir plus sur notre action et nous soutenir, rendez-vous en ligne sur www.medair.org/fr.
Au nom de toute l’équipe de Medair, je vous remercie pour votre soutien.
Cet article a été publié dans “Cahier spécial” “Stay Home” axée sur le Covid19, dont la publicité est apparue aux Tribune de Genève et 24Heures le Samedi 11 April 2020