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Entretien avec Anne Reitsema – Mois international de la femme

Entretien avec Anne Reitsema – Mois international de la femme

Alors que nous entrons dans le mois de mars et qu’il s’agit du Mois international de la femme, nous avons rencontré Anne Reitsema, directrice générale de Medair, pour une tasse de café et une conversation sur le travail de Medair en faveur des femmes vulnérables – et sur certaines des femmes qui l’ont inspirée tout au long de son parcours.

 

Q : Bonjour, Anne. La/le journée/mois international(e) de la femme peut être abordé(e) sous de nombreux angles. Quand vous y pensez dans le contexte de Medair, qu’est-ce qui vous vient à l’esprit ?

Dans le cadre du travail que nous effectuons à Medair, nous savons que les femmes et les enfants sont les personnes les plus vulnérables en cas de conflit ou de catastrophe. De par mes fonctions, j’ai également le privilège de me rendre dans les pays où nous apportons une aide humanitaire – et la joie d’entendre directement nos collègues parler de leur travail. Lorsque je discute avec notre personnel féminin, il est clair que beaucoup d’entre elles sont confrontées à des difficultés pour évoluer professionnellement et mener à bien leur travail d’humanitaires, simplement parce qu’elles sont des femmes.

Mais ce qui me frappe le plus, c’est l’inspiration qu’elles se donnent mutuellement. Une collègue m’a dit récemment : « Son courage me donne du courage – et mon courage donne du courage à la femme suivante ». Ce commentaire m’est resté en mémoire comme un exemple réel et tangible de la contagion de l’espoir. Nous nous inspirons les unes les autres parce que nous voyons l’espoir apporté par le courage, l’action et les actes des autres.

 

Q : Parlez-nous de quelques-uns des moyens mis en œuvre par Medair pour soutenir les femmes vulnérables.

Medair apporte son soutien dans les pays où il peut être difficile d’être une femme par le biais de réseaux communautaires. Il est vraiment réconfortant de voir que ces réseaux de soutien, que nous mettons en place, sont utiles et permettent aux gens de prendre soin les uns des autres bien au-delà de notre présence.

Les femmes des communautés que nous servons jouent un rôle central dans la fourniture de soins et de soutien à d’autres personnes qui, comme elles, ont été touchées par un conflit ou une catastrophe et ont beaucoup de choses à traiter et à surmonter.

La mise en place de ces réseaux communautaires et leur efficacité nécessitent du temps, des efforts, de la compassion et de la ténacité. Nous formons des promoteurs qui, à leur tour, forment des « mères chefs de file » chargées de s’occuper d’un groupe de femmes voisines et de les aider à adopter les bons comportements en matière d’allaitement, de nutrition ou de santé mentale. Cette approche permet aux communautés de prendre soin les unes des autres.

J’ai été stupéfaite par l’engagement enthousiaste de ces femmes à créer et à intégrer ces plates-formes de soins, de guérison et de rassemblement. Elles consacrent leur temps à cette tâche parce qu’elles en voient l’impact positif – et qu’elles sauvent des vies grâce à leurs efforts de soins et de prévention.

 

Q : Comment Medair prend-elle en compte la sécurité des femmes lors de la planification de ses programmes ?

Dans les pays où nous opérons, les femmes et les jeunes filles peuvent se trouver en danger de multiples façons. Prenons par exemple la corvée d’eau, qui incombe généralement aux membres féminins d’un foyer.

Dans nos programmes, lorsque nous examinons l’emplacement d’un point de collecte d’eau, nous prenons toujours en considération la localisation d’après les cartes hydrogéologiques, en tenant compte également de la distance que les femmes devront parcourir, souvent seules et sans protection.

Nous envisageons toujours notre programmation – y compris l’aide financière – sous l’angle de la protection, en donnant la priorité à la sécurité des femmes et en minimisant les dangers. Nous encourageons le déplacement des communautés en grands groupes ou proposons des solutions culturellement adaptées aux femmes dans les régions où l’on attend d’elles qu’elles soient accompagnées.

 

Q : Parlez-nous d’une femme bénéficiaire qui vous a inspirée

Il y en a tellement ! Mais je vais choisir la plus récente. Je reviens tout juste d’Afghanistan et, alors que je visitais l’un des centres de soins de Medair qui apporte une aide sanitaire et nutritionnelle à des centaines de personnes chaque jour, j’ai eu le temps de m’entretenir avec certaines des mères présentes sur place. J’ai été particulièrement émue par une femme extraordinaire, qui avait accouché seulement trois jours auparavant et qui avait marché un kilomètre et demi jusqu’au centre de soins pour obtenir de l’aide pour l’infection de son enfant.

Chez Medair, nous parlons de faire un effort supplémentaire pour aider les gens. Ce qui m’a frappé à cette occasion, c’est qu’elle avait fait plus qu’un effort supplémentaire, en parcourant les trois miles aller-retour à pied, poussée par l’amour d’une mère pour son enfant. Cette énergie et cette volonté de se battre pour la valeur de la vie de son enfant m’ont vraiment inspirée. Ce fut un privilège de rencontrer les femmes de la clinique lorsqu’elles étaient dans le besoin.

 

Q : Parlez-nous d’une collègue qui vous a inspirée.

Au fil des années passées au sein de Medair, j’ai rencontré un grand nombre de femmes remarquables qui font preuve d’une attention et d’une compassion authentiques à l’égard des autres. Plusieurs de mes collègues actuelles me viennent immédiatement à l’esprit et je ne peux que m’excuser de ne pas pouvoir toutes les nommer !

Prenons l’exemple de Becks, de notre équipe d’intervention d’urgence. Je suis impressionnée par la façon dont elle interagit avec les gens dans les communautés que nous servons, en vivant l’amour de manière très tangible et en se sacrifiant. La façon dont elle se concentre sur les besoins d’autrui est tout simplement magnifique. Sa foi est aussi authentique qu’inspirante – un élément important de sa force.

Ou encore Noor, dont l’énergie positive et les bonnes vibrations imprègnent tout ce qu’elle fait. Le café d’apprentissage des langues qu’elle dirige personnellement à Gaziantep rassemble les gens au-delà des clivages, dans un environnement de soutien et d’encouragement. Bref, c’est un endroit fabuleux et inspirant – en grande partie grâce à sa personnalité aimante et à sa capacité naturelle à réconcilier les gens.

Ou peut-être Sadia, que j’ai rencontrée au Darfour et dont je ressens encore l’amour aujourd’hui. Cette femme étonnante, qui ouvrait les portes de sa maison et accueillait des orphelins, nous rendait meilleurs chaque jour, simplement en étant elle-même – un personnage indéfectiblement joyeux et positif. Je me souviens encore de la chaleur de ses étreintes et même de l’odeur de son parfum.

Il y a tant d’autres femmes qui m’ont inspirée tout au long de mon parcours et, comme je l’ai dit, je ne peux que m’excuser de ne pas pouvoir citer tout le monde ici.

Je soulignerai toutefois quelques caractéristiques essentielles partagées par toutes. Leur force réside dans la manière dont elles traitent les autres. L’amour et l’attention qu’elles manifestent sont la preuve de leur espoir. J’ai récemment entendu quelqu’un dire : « La personne qui a le plus d’espoir aura toujours le plus d’influence ». Ce n’est pas le statut ou la position qui nous permet d’avoir le plus d’impact. C’est la qualité de nos relations, la personne que nous sommes et la manière dont nous remarquons et accompagnons les autres.

Vous savez tous qui vous êtes. Je vous remercie !